"Je ne connais ni mon nom, ni mon âge. Je ne me souviens que d'une chose, ce prénom maudit: Nergal. Le reste, pour moi, c'est flou. J'erre depuis des années, depuis des siècles. Je n'ai plus de maison. En ai-je déjà eu une ? Parfois, je me demande si je ne suis pas nait comme ça. Mais je sais que j'ai un passé, et que ce dernier a un rapport avec Vanilius, le dieu des Tourments de l'Ames et Guide des Morts vers l'Au-delà. Et avec Demonio, Dieu des Enfers."
Environ de Gathol, an 700
Avançant dans la ville sur son cheval, Nergal Losshäm cherche son contact des yeux. Avançant sans méfiance, il se retrouva bientôt dans une sorte de petite clairière. Au loin, les feux de camps du village qui deviendra Gathol brillaient. Au centre de cette clairière,un homme, assis en tailleur. Nergal descendit de sa monture et, sans se donner la peine de prendre son épée, avança jusque l'inconnu. Le Seigneur de Guerre que le cavalier servait n'avait donc pas mentit. Il n'avait pas eu besoin de chercher son contact très longtemps.
S'approchant, confiant de la réussite de sa mission, Nergal demanda à l'homme :
- Etes-vous Khellis ?
- Je le suis, répondit l'homme sans lever la tête. Tu es Nergal Losshäm, messager du Seigneur D'Hask ?
- Je le suis. Répondit à son tour Nergal.
Rien qu'au nom de D'Hask, le cavalier fut envahit par une fierté arrogante. Il était au service d'un puissant Seigneur de Guerre barbare, redouté dans le royaume. L'homme leva enfin la tête. Mais quelque chose n'allait pas. Du sang coulait des orifices de l'inconnu. Et surtout, ses lèvres étaient cousus. Horrifié, Nergal recula mais il se heurta à quelque chose...ou plutôt quelqu'un. L'homme se retourna et un éclair blanc lui explosa aux yeux. Il sentit un liquide chaud couler sur son visage. Avant de sombrer dans l'inconscience, il reconnut quatre de ses compagnons.
Ces derniers s'acharnèrent sur le corps de Nergal avant de fuir, le laissant agoniser jusqu'à la mort.
"Je pensais n'avoir aucun souvenir. Mais parfois, celui de ma renaissance me hante, les nuits où Morphée m'enlacent. Demonio m'a redonné mon corps, Vanilius mon âme. Je me suis ensuite retrouvé dans la forêt des Ombres, Angemort en main. Qui me l'a donné ? Qui l'a forgée ? Je ne sais pas...je ne sais plus. J'ai massacré. Le sang a coulé d'une façon inimaginable. Pas une guilde. Une armée. Deux, voir trois cents hommes. Tués dans leur sommeil. C'était la vengeance qui apparaissait sous un masque nommé "folie". J'erre depuis des siècles. Je ne me souviendrais plus jamais de rien. Mais une chose est sûr, je reste le fidèle Paladin de Vanilius."
Quelque part dans Vesperae, an 700
"Il se réveille" disait une voix de femme. Ouvrant un oeil, Nergal aperçut une jeune et belle femme. Elle portait une longue robe noire. Quand il ouvrit les deux yeux, le monde tourna autour de lui. Il ne chercha pas à se lever. La femme l'observait avec curiosité et envie. Elle dit alors :
- Vous revenez de loin Sire.
- Qui...êtes...vous ? Chuchota le cavalier, comme si parler était un acte trop dur pour lui. Où...sommes...nous ?
- Ne vous inquiétez pas. Vanilius et Demonio vous ont ramenés ici pour vous soigner. Nous sommes quelques part dans Vesperae. Reposez vous.
Antria, an 710
Nergal était de retour sur Vesperae, après dix années passées dans les profondeurs du royaume. Extrêmement changé, il n'était plus l'homme d'avant, le larbin de D'Hask. Il avait apprit que son maître l'avait trahit. Il ne pensait qu'à une chose, se venger. Sa nouvelle monture l'avait amené au port du royaume. Durant des jours, Nergal resta dans l'ombre des ruelles malsaines. Guettant chaque arrivée et chaque habitant, il cherchait avidement D'Hask. Deux mois passèrent quand le Seigneur de Guerre entra dans la guilde avec deux de ses sbires. Ils commandèrent une grande quantité de nourritures et de boissons pour leurs compagnons à l'extérieur de la ville. Quand ils repartirent, Nergal les suivit, toujours caché dans l'Ombre. Il passa le reste de la journée à les observer. Enfin, quand les festivités de la nuit où ces barbares s'adonnèrent aux viols et aux beuveries s'achevèrent, il sortit son épée. Son Angemort. Il se laissa alors porter par la haine qu'il ressentait pour ces hommes. Vanilius tranchait à travers Angemort, Demonio guidait son bras. En moins d'une heure, trois cents cadavres se vidaient de leur sang. Mais une vie, la plus misérable de toutes, n'était pas encore éteinte.
Nergal s'avança vers la tente de D'Hask et la déchira avec des mouvements circulaires de son épée. Le Seigneur se leva, son épée en main. Il fixait son ancien sbire, son habituel sourire moqueur figé dans une moue d'horreur. Il sembla quand même reconnaitre celui qu'il avait trahit :
- Nergal ? C'est toi ?
- Comme tu le vois. Tu m'as retiré la vie. Je vais retiré la tienne. Répondit Nergal d'une voix glaciale.
D'Hask éclata d'un rire froid et sonore.
- Ne soit pas si sûr de toi.
Le Seigneur leva son arme et porta un puissant coup que Nergal n'aurait pus éviter. Sauf qu'il avait disparut, réfugié dans les Ombres. Surpris, D'Hask le chercha des yeux. Et ce n'est que lorsqu'il baissa sa garde un court instant qu'il perdit sa tête et la vie. Surgit sur sa gauche alors que l'homme pensait que le danger semblait s'éloigner, le cavalier noir réapparut pour lui trancher net la tête.
Une fois son forfait accomplit, Nergal mit le feu au campement, offrant ces âmes à Vanilius. Il remonta sur son cheval et repartit, dans la brume qui envahissait les plaines.